L'activité protéolytique liée à la plasmine a été décrite dans le film lacrymal pré-cornéen des chiens atteints d'ulcères cornéens épithéliaux chroniques et contribuerait à retarder la cicatrisation épithéliale. L'efficacité clinique de l'acide epsilon-aminocaproïque (AEAC), déjà décrite dans le traitement de cette affection chez des modèles lagomorphes, a été explorée dans l'espèce canine grâce à cette étude rétrospective. Les dossiers médicaux des chiens atteints de déficits épithéliaux entre Octobre 1997 et Mars 2003 ont été analysés. Le diagnostic a reposé sur la présence d'une perte de substance épithéliale évoluant depuis plus de 10 jours sans cause sous-jacente apparente. A la première consultation, le lambeau épithélial marginal non adhérent a été débridé sous anesthésie locale sur tous les yeux au moyen d'un coton-tige stérile. Sur 34 yeux (28 chiens), un traitement adjuvant consistant en l'instillation locale trois fois par jour d'un collyre à base d'AEAC à 35.7 mg/ml (groupe AEAC) a été réalisé. Dix-sept yeux (16 chiens) ayant reçu uniquement un collyre de gentamicine à 3 mg/ml après desépithélialisation ont été inclus pour servir de groupe contrôle. Après le début du traitement, des suivis cliniques ont été réalisés chaque semaine pendant trois semaines. Les deux groupes de traitement avaient approximativement la même distribution raciale et ne présentaient pas de différence statistique significative (P>0.05) pour l'âge, le genre, le côté affecté et la durée d'évolution de l'ulcère. Les résultats ont montré qu'à la fin de la période de suivi (J21), le taux global de guérison était significativement plus élevé (P=0.0001) dans le groupe AEAC (32/34= 94.1%) que dans le groupe contrôle (7/17=41.2%). Aucun effet secondaire n'a été noté pendant la période d'observation. Cette étude suggère que l'utilisation locale d'AEAC semble bénéfique dans le traitement des pertes épithéliales cornéennes idiopathiques chez le chien et confirme indirectement que le système activateur du plasminogène / plasmine, inhibé par l'AEAC, est impliqué dans la pathogénie de cette affection.