Notice par François VALLAT: Cet exemplaire est un 3e prix donné par le Ministre de l'Intérieur le 15 Germinal an XII, à Louis Cremerel, de Claye (Seine et Marne) Lorsque Félix VICQ d’AZYR (1748-1794) publie, en 1776, son Exposé des moyens curatifs et préservatifs qui peuvent être employés contre les maladies pestilentielles des bêtes à cornes, il vient de passer deux années en tant qu’émissaire du Gouvernement dans la lutte contre la Peste bovine du sud-ouest de la France. Cette région, éloignée du foyer principal de Flandre et des Pays-Bas, a connu, à partir de 1774, une mortalité du bétail d’une gravité inouïe. Dans ce pays où l’on n’utilise pas le cheval de culture, les bovins représentent une source de viande et de fromage, mais surtout l’unique force de traction agricole. Les labours devenus impossibles, l’épizootie conduit tout droit à la disette. Louis XVI, qui vient d’accéder au trône en mai, a confié le Contrôle général à Turgot, homme de progrès gagné aux idées des Physiocrates et qui regarde l’agriculture comme le fondement de la richesse des nations. Les conditions, on le voit, sont réunies pour que l’État s’implique totalement dans la lutte contre l’épizootie et, de fait, cet épisode restera longtemps exemplaire, car il faudra attendre le dernier tiers du XIXe siècle pour que soient prises, en matière de contagion animale, des décisions aussi radicales. Turgot se tourne aussitôt vers l’Académie des Sciences afin qu’elle envoie sur place un de ses membres. Le choix se porte sur Félix Vicq d’Azyr, brillant médecin anatomiste de 26 ans, dont la jeunesse promet sans doute plus de fougue, de résistance aux fatigues et de mobilité sur le terrain. Le premier soin du nouvel académicien est de lire tout ce qui a été écrit sur le sujet, en particulier par ses grands prédécesseurs italiens, Fracastor, Giovanni Mario Lancisi et Bernardino Ramazzini. Par la suite, il se livrera à des expériences d’inoculation, qui, malgré l’ingéniosité de certains procédés d’atténuation de la matière virulente, n’aboutiront à rien de positif (p. 94 à 109). C’est donc sur la police sanitaire que Félix Vicq d’Azyr porte ses efforts, pleinement soutenu, à Versailles, par Turgot. Il lui faut malheureusement faire face à une contagion déjà bien installée. Dans ces conditions, les mesures d’abattage partiel, l’interdiction de déplacer le bétail et autres séquestrations ne se soldent que par des succès éphémères. Le Contrôle général ne retire pas pour autant sa confiance à son envoyé. L’insuffisance des résultats est autant attribuable, selon lui, au mauvais vouloir des populations qu’à la défection des responsables locaux. On commence donc, à partir de janvier 1775, par indemniser en partie les propriétaires d’animaux abattus, dans l’espoir de favoriser la déclaration précoce des nouveaux cas. Mais, devant l’aggravation du mal, c’est à la troupe que vont incomber, à compter du 1er novembre, les opérations de police sanitaire. La relative brutalité de ces mesures correspond parfaitement à la façon de gouverner de Turgot, lequel, animé des meilleures intentions mais dirigiste à l’excès, frôle parfois la maladresse. L’épizootie finit enfin par s’éteindre. Cette crise, cependant, a eu pour effet de convaincre le pouvoir de la nécessité d’un organisme expert en matière de contagion, humaine ou animale. Vicq d’Azyr et de Lassone, premier Médecin de Louis XVI, forment dans cette intention une commission qui deviendra, avec l’aide de Necker, en 1776, la Société Royale de Médecine (actuelle Académie de Médecine). Vicq d’Azyr, lorsqu’il traite des maladies des animaux, reste avant tout médecin : en fait de contagion animale, il fonde son raisonnement sur la Peste humaine à laquelle il consacre d’emblée plus de 60 pages (p. 11 à 74). Notons qu’il ne nomme jamais la Peste bovine, à laquelle il peine à accorder une réelle spécificité, autrement que l’épizootie ou la maladie pestilentielle des bêtes à cornes. Suivent les lettres et les notes écrites par l’auteur, de 1774 à 1776, pendant sa mission (p. 75 à 121), puis une revue bibliographique détaillée des épizooties des bovins (p. 122 à 232), les remèdes « conseillés contre l’épizootie actuelle » (p. 234 à 477) et enfin différents éléments de diagnostic (p. 478 à 507). La seconde partie (p. 508 à 596) concerne les Moyens préservatifs, c’est-à-dire prophylactiques. On y trouve nombre d’avis imprimés, publiés par Vicq d’Azyr lorsqu’il combattait la contagion dans le sud-ouest du pays. La troisième et dernière partie contient les ordres émanés du Gouvernement et permet de suivre, chronologiquement, le travail réglementaire, certainement inspiré par l’auteur lui-même. Pour terminer, les pages 679 à 707 concernent l’épizootie ailleurs qu’en Languedoc, particulièrement en Flandres. On mesure l’importance du présent ouvrage, résumé exhaustif, en cette fin de l’Ancien Régime, des connaissances sur les épizooties ; fruit d’une expérience vécue ; témoin de la médecine des Lumières en action ; comptable, enfin, des tâtonnements d’une administration désemparée à la recherche d’une réglementation efficace et encore très hypothétique. ------------- état des livres : moyens 2 exemplaires armoire 14 bas, étagère 2 et armoire 33 bas, étagère 2