Ce livre se veut une tentative de penser la pratique médicale en resituant l’interprétation scientifique de la plainte dans une perspective portant une attention particulière aux dimensions de corporéité, de temporalité et d’altérité. À une expérience de clinicien, Donatien Mallet ajoute la réflexion philosophique, épistémologique enrichie de l’approche de la sociologie des sciences. À l’aspect technique de la pratique médicale, s’ajoute la dimension relationnelle du soin et la réflexion sur la proportionnalité des traitements. De triomphante, voire aveugle et déshumanisée, la médecine, et donc sa pratique, en redevient souci de l’autre, comme de soi-même. De fait, le savoir de la médecine se replace comme « service » pour le sujet souffrant. Elle retrouve toute la grandeur qui est la sienne en se recentrant sur l’homme qui la préoccupe, l’homme souffrant, renforcée qu’elle est d’un savoir scientifique objectif. Donatien Mallet insiste sur le rapport au corps, l’habitation du temps, la confrontation à la limite, la tentative de soi comme de l’autre. La pratique médicale associe un mouvement d’objectivation, d’analyse de la plainte et un mouvement d’attention à la subjectivité de la maladie. Dans une première partie, l’auteur propose une étude de la double polarité de la médecine en analysant plus particulièrement certains aspects de la clinique. La clinique est le socle invariant de toute démarche médicale. Dans une deuxième partie, il analyse les fondements du pôle d’objectivation et ses références à la science. Cette analyse épistémologique permet de faire lien entre objectivation et volonté d’être au cœur même de l’humain. Cette analyse couplée à une lecture sociologique de la fonction qu’occupe la science dans la constitution de la société ouvrira la porte à la troisième partie. Dans cette dernière, on assistera à la réintroduction de la bipolarité de la pratique médicale en resituant l’objectivation de la plainte au sein d’une lecture existentielle de l’expérience de la maladie. Les critères de corporéité, de temporalité et de coexistence permettent de replacer l’interprétation objectivante dans une perspective plus existentielle. Il s’agit là d’un travail de fond qui nous est livré. Travail riche d’une réflexion empreinte du souci de l’autre, du souci éthique convoqué impérieusement dès lors que l’on prétend soigner. Un livre qu’il faut lire et faire lire.