Chez les manchots (famille des Spheniscidae), la reproduction est caractérisée par une alternance de jeûnes à terre et de périodes d’alimentation en mer. Dans de rares cas, le jeûne se prolonge au-delà de l’utilisation de 90 % des réserves lipidiques initiales ; l’animal abandonne alors la reproduction et part s’alimenter en mer. Cet important appauvrissement des réserves énergétiques impacte-t-il les performances en mer ? Afin de répondre à cette question, des manchots royaux (Aptenodytes patagonicus) ont été soumis à un jeûne expérimental modéré ou intense, puis équipés d’un enregistreur de pression hydrostatique et de température ambiante permettant de reconstituer leur activité en mer. Il a été observé que les animaux sont parvenus à restaurer leurs réserves énergétiques indépendamment de leur état nutritionnel au départ de la colonie : les individus des deux groupes présentaient des masses corporelles similaires au retour du voyage alimentaire. Cependant, les individus ayant subi un jeûne intense ont réalisé des plongées moins efficaces (i.e. moins de proies capturées par unité de temps) que ceux ayant subi un jeûne modéré. Ces deux résultats semblent paradoxaux et laissent supposer l’existence d’un mécanisme compensatoire permettant aux individus ayant subi un jeûne intense de restaurer leurs réserves énergétiques malgré une efficacité de plongée réduite. Des hypothèses pour expliquer ces observations sont émises puis ces résultats sont discutés en termes de compromis entre investissement dans la reproduction en cours et la survie.