Les principales associations de protection animale estiment recenser chaque année environ 100 000 animaux effectivement abandonnés. Le phénomène de l'abandon nécessite d'être encore davantage compris pour permettre l'élaboration de stratégies de prévention. En France, il n'existe aucune étude s'intéressant aux points de vue et aux attitudes des vétérinaires praticiens confrontés à l'abandon des carnivores domestiques. Quels sont leurs ressentis vis-à-vis des abandons ? Dans quel rôle se retrouvent les vétérinaires praticiens ? Nous nous sommes intéressés à ces questions de manière qualitative et inductive au travers de la méthode de la théorisation ancrée, visant à construire des concepts à partir de données empiriques qualitatives. Les données ont été récoltées aux cours d'entretiens individuels grâce à un guide d'entretien orientant, de manière semi-directive, les éléments devant être abordés avec les acteurs. De nombreux thèmes se rapportant à la problématique complexe de l'abandon ont été mis en évidence. Les perceptions de la relation Homme-animal, des responsabilités dans le processus d'abandon, de l'étendue des compétences professionnelles, de la gestion des priorités et du temps ou encore des caractéristiques de l'implication des vétérinaires ont été abordées. D'autre part, l'implication émotionnelle s'est imposée dans les entretiens : la complexité des liens sociaux s'est révélée incontournable et l'empathie est perçue comme essentielle à la compréhension de l'autre et de son état émotionnel. Le rôle perçu du vétérinaire se limite alors à fournir des conseils basés sur les recommandations actuelles et à contribuer au développement d'une relation Homme-animal riche et solide. Cependant les vétérinaires craignent parfois les conséquences émotionnelles et réglementaires de leur implication. Des notions de comportement animal mais aussi de psychologie humaine semblent s'avérer nécessaires pour diminuer les difficultés perçues par les vétérinaires.[-]